Cela aurait pu faire clic. Rupture. Silence. Les sons sont dévorés par le vide. Digérés. Par rien.
Kami n’entend pas mais il sent. Il s’est passé quelque chose. Pas normal. Il regarde sur le côté. Angle mort. Il opte pour un demi-tour. Ne pas partir en toupie. Il voit. Le câble s’est détaché du scaphandre. Il tend le bras. Il manque cinq centimètres, puis dix, puis cent. Il commence à dériver dans l’espace, en tournant légèrement sur lui-même. Sueur. Panique. Ce n’est pas possible, la technique est infaillible ! Il y avait deux câbles.
– Kami, tu as perdu ta ligne de vie. On vient te chercher.
– Bien reçu.
– Combien te reste-t-il d’autonomie ?
– Une heure et demie. Si je reste calme.
– Ok. Reste calme.
Kami sait qu’avec cette dose de stress, il ne tiendra pas trente minutes.
Cela devrait suffire.
Accélération. Un satellite de plus dans la ceinture d’astéroïdes. Le seul en or. Sa combinaison blanche renvoie les rayons du soleil. Deux cents kilomètres heure. Mille. Et c’est tout ?
Le vaisseau s’éloigne. La manœuvre d’appareillage consume un certain temps. Kami tourne sur lui-même comme une toupie en perdition.
– Nous t’avons en ligne de mire.
Le vaisseau se rapproche enfin. Trois barres au rouge. Se calmer. Est-ce du sang ? Non, pas encore. Juste trois barres sur un écran. Se calmer. Ne pas respirer trop. Trois minutes.
Kami déploie sa main comprimée par le kevlar. Vers la sphère bleue. Du moins, ce qu’il pense être la sphère bleue. Une minute. Deux mille kilomètres heure. Sa vie défile encore plus vite. Dernier regard vers la Terre. La vie. Hasard de la physique ou dessein intelligent ? Kami connaît la réponse.
Il tâche de mourir en fixant sa maison, ses origines. La rotation l’en empêche.
– Nous sommes arrivés trop tard.
Arrivés trop tard pour les uns, parti trop tôt pour l’autre. Trop pressé ?
A ne pas prendre en compte que le temps n’a pas la même valeur pour tous, il fallait bien que ça arrive. Et caler les montres n’y change rien.